Mélanie Marcos et Studio TARTAR → 3 mars 2021
« La dignité humaine est inviolable. Elle doit être respectée et protégée » – Article 1 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
C’est pour garantir le droit au respect et à la protection de la dignité humaine que le droit de l’Union européenne prévoit que tou·te·s les personnes en demande d’asile doivent recevoir des conditions matérielles d’accueil dignes dans les États membres de l’Union.
En France :
C’est l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) qui est chargé de proposer les « conditions matérielles d’accueil » (CMA) à toute personne qui demande l’asile dans les délais et conditions impartis par la loi.
Ces CMA comportent :
- une aide financière (6,80€ par jour/personne hébergée, dégressif en fonction du nombre de personnes composant la famille ex. 17,00€/jour pour une famille de 4 personnes hébergées) ;
- une proposition d’hébergement dans une structure adaptée.
Les structures qui hébergent les demandeur·se·s d’asile :
Il existe différents dispositifs d’hébergement pour les personnes en demande d’asile
- CADA : Centre d’accueil pour demandeurs d’asile (représentant presque 50% des places du dispositif national d’accueil)
- HUDA: Hébergement d’urgence pour demandeurs d’asile
- CAO : Centre d’accueil et d’orientation
- AT-SA : Accueil temporaire – service de l’asile
- CAES : Centre d’accueil et d’examen de situation administrative
- PRAHDA : Programme d’accueil et d’hébergement des demandeurs d’asile
Ces différents dispositifs sont gérés par des associations (France terre d’asile, Forum Réfugiés Cosi, etc.) ou des entreprises (ADOMA, COALLIA, etc.) sur financement de l’État.
Focus sur le CADA :
CADA = Centre d’accueil pour demandeurs d’asile est le dispositif d’hébergement le plus déployé sur le territoire national en raison de la pérennité de son accompagnement (ce n’est pas un dispositif d’hébergement d’urgence mais un hébergement et une proposition d’accompagnement qui durent tout le temps de l’instruction de la demande d’asile).
Temps de l’hébergement et de l’accompagnement : il se fait à partir du dépôt de la demande d’asile jusqu’à décision définitive de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ou de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) :
- si décision négative : le/a demandeur·se·s d’asile doit sortir de l’hébergement dans un délai d’un mois
- si décision positive : le/a demandeur·se d’asile doit sortir de l’hébergement dans un délai de trois mois (renouvelable une fois).
Durée moyenne d’hébergement : environ 9 mois.
Quel est le public accueilli par les CADA ?
Les CADA accueillent :
- des familles biparentales ;
- des familles monoparentales ;
- des personnes majeures isolées.
Ces personnes en demande d’asile peuvent venir :
- de la région où la demande d’asile a été effectuée ;
- de tout le territoire national dans le but de désengorger les régions les plus sollicitées ;
- d’autres pays européens dans le cadre de programmes de « relocalisation » dans un souci de partage des demandes d’asile entre les États européens (ex. : Grèce, Italie).
Les CADA ne peuvent pas héberger des personnes en procédure DUBLIN, c’est-à-dire les personnes dont les empreintes ont été prises dans un autre État de l’Union Européenne qui devient alors responsable de sa demande d’asile. Ces personnes sont alors en attente de transfert vers l’État responsable de l’instruction de leur demande.
Quelles sont les missions des CADA ?
- L’accueil
- L’hébergement : selon les structures, l’hébergement peut être collectif (au sein d’un même immeuble) ou diffus (appartements individuels ou en colocation). Le cahier des charges CADA impose un minimum de 7,5 m² de partie privative pour une personne, des sanitaires, du mobilier de base, et des cuisines individuelles ou collectives (à défaut, le gestionnaire doit assurer un service de restauration).
- L’accompagnement social : exemples – scolarisation des enfants, apprentissage ou renforcement de la langue française (pas de droit au travail et à la formation professionnelle donc cours assurés par des bénévoles), accompagnement dans l’accès aux soins, animations axées sur l’autonomisation et l’intégration.
- L’accompagnement administratif : exemples – ouverture des droits d’assurance maladie, accompagnement juridique sur la demande d’asile et droit des étrangers (aide à la rédaction du récit de vie et informations sur les procédures), accompagnement vers un logement pour la sortie du CADA des personnes bénéficiaires d’une protection.
Ces missions sont assurées par une équipe de travailleur·se·s sociales/aux qualifiés (conseiller·e·s en économie sociale et familiale, assistant·e·s sociales/aux, éducateur·ice·s spécialisé·e·s, juristes pour certaines associations).
Le CADA, dispositif le plus adapté aux personnes en demandes d’asile
Les CADA apparaissent comme étant le dispositif le plus adapté tant les missions qui leur sont confiées sont importantes : ces centres offrent des sources et des informations qualifiées pour la compréhension du système français et une possibilité d’autonomisation dans les démarches administratives et sociales des demandeur·se·s d’asile en France.
Malheureusement, seules 43 600 places CADA existent en France à ce jour.
Le nombre de demandes d’asile est bien plus élevé que le nombre de places d’hébergement mises à disposition par l’État.
En 2019, seules 50% des personnes en demande d’asile étaient hébergées.
Tous dispositifs confondus en 2019 : 84761 places d’hébergement pour 132 700 demandes d’asile enregistrées la même année (soit 63%)
la France dénoncée pour la mise en œuvre des conditions matérielles d’accueil des demandeur·se·s d’asile
Le Défenseur des Droits dénonce régulièrement le manque d’efforts de l’État dans le déploiement des hébergements pour demandeur·se·s d’asile.
Le 2 juillet 2020, la Cour européenne des droits de l’Homme (CADH) a même condamné la France pour traitements dégradants « témoignant d’un manque de respect pour la dignité » des demandeur·se·s d’asile considérant que les autorités françaises doivent « être tenues pour responsables des conditions dans lesquelles [les requérants] se sont trouvés pendant des mois, vivant dans la rue, sans ressources, sans accès à des sanitaires, ne disposant d’aucun moyen de subvenir à leurs besoins essentiels et dans l’angoisse permanente d’être attaqués et volés » et suscitant « sans aucun doute, (…) des sentiments de peur, d’angoisse ou d’infériorité propres à conduire au désespoir ».
© Infographies Studio TARTAR
Mélanie Marcos et Studio TARTAR
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