LES ARTISAN·E·S DES DROITS HUMAINS

De la nécessité de documenter

« Il y a beaucoup eu et peut-être y aura-t-il encore des manifestations contre la réforme des retraites. Je voulais m’impliquer en documentant ces mouvements de grèves. Je fais de la photographie mais je ne suis pas journaliste, pas reporter, plutôt du côté des artistes avec un intérêt pour une forme de réalisme documentaire. »

→ 25 mars 2020

Les premières journées ont été un peu floues pour trouver comment j’allais m’y prendre. Au départ, j’amenais mon appareil photo argentique et à part quelques timides photos d’observation, je ne trouvais pas mon angle d’approche.

C’est au 36ème jour de grève, le jeudi 9 janvier, que je me suis décidé à marcher avec un reflex numérique et un grand angle, m’approchant davantage d’une esthétique d’image de photo-reporter. C’est plus difficile de magnifier les gens avec ce type d’angle mais cela permet d’avoir un champ de vision plus grand que son seul regard.

Je ne voulais pas trop poétiser ce que j’allais photographier mais plutôt être proche et lointain à la fois. Un optique grand angle vous oblige à vous mettre assez prêt de certains éléments pour composer des images plus percutantes, si vous ne faites pas l’effort de vous rapprocher des sujets qui vous intéressent, il n’en ressortira que des photographies distantes et froides.

Or, c’est bien le contraire que j’ai ressenti ce jour-là. Je suis  arrivé avec une petite heure de retard et j’ai commencé à photographier depuis l’arrière du cortège encore à République, pour remonter petit à petit le groupe de manifestants. J’espérais prendre des photographies équilibrées : trouver un équilibre entre la documentation d’un mouvement contestataire et son esthétique.

J’étais libre de mes mouvements : pas de sac, pas de téléphone, et hormis mon appareil photo rien n’interférait entre les personnes présentes ce jour-là et moi-même. L’arrière du cortège était un bain de foule serré, mais la sensation d’en faire partie procurait une chaleur humaine, finalement assez rassurante.

Pour introduire ces images, sachez que j’ai marché jusqu’à ce mon genou me dise d’arrêter. Il a tenu jusqu’à la gare Saint-Lazare, ce qui correspondait à une série d’éléments convergents marquant la fin de cet événement. Il commençait à pleuvoir, la police a décidé d’étriquer les manifestants en créant un couloir oppressant de policiers avec des sortes de casques de moto. La lumière avait baissé, une tension palpable se faisait ressentir. Et je n’ai pas l’expérience pour documenter des affrontements sans me prendre des coups ou des balles en caoutchouc dans le corps.

 

En fait, ces images sont probablement naïves de ma part, mais ces photographies sont davantage là pour célébrer une présence joyeuse et positive du mouvement, que pour montrer les mauvais côtés d’une manifestation. 

Ce sont les photographies d’une foule courageuse, qui a eu la force de se réunir pour aller de l’avant contre la loi d’un gouvernement. L’Etat n’est présent autrement que par ses policiers sur place, l’État n’observe ces manifestants que par des statistiques et l’image que les médias veulent bien en donner. 

Je voulais juste témoigner de ce que j’ai vu : de la joie et une foule forte contre un pouvoir en place borné et si loin de ces personnes.

@ Photographies de Hugo Renard

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